Imatges de pàgina
PDF
EPUB

pour

la

presque invincible? Qui fait cela, chrétiens? cette grâce de direction que Dieu a donnée à ses ministres conduite des fidèles. Car, le même caractère qui les constitue nos juges dans le tribunal de la pénitence, pour prononcer sur le passé, les constitue nos pasteurs, nos guides, nos médecins, pour l'avenir. Je dis nos médecins, pour nous tracer le régime d'une sainte vie; nos guides, pour nous montrer le chemin où nous devons marcher; nos pasteurs, pour nous éclairer dans nos doutes, pour nous redresser dans nos égaremens, pour nous ranimer dans nos défaillances, pour nous donner une pâture toute céleste qui nous soutienne. Comme en vertu de leur ministère ils sont tout cela, ils ont grâce pour tout cela; et cette grâce, qui n'est que gratuite pour eux-mêmes, mais sanctifiante pour nous, est justement celle qui agit en nous quand nous nous soumettons à eux avec toute la docilité convenable. Tel est l'ordre de Dieu, mes chers auditeurs. C'est ainsi qu'il a gouverné les plus grands hommes et les plus éminens en sainteté. Il pouvoit les sanctifier immédiatement par lui-même, mais il ne l'a pas voulu. Il les a assujettis à d'autres hommes, et souvent même à d'autres hommes moins élevés et moins parfaits. Il s'est servi des foibles lumières de ceux-ci, pour perfectionner les hautes lumières de ceux-là. Voilà comment en a toujours usé sa providence. Or, il n'est pas croyable que cette loi ayant été faite pour tous les saints, Dieu en doive faire une nouvelle pour nous.

Sur quoi je ne puis assez déplorer l'aveuglement des gens du siècle, qui, par une erreur bien pernicieuse, ou pour mieux dire, par une mortelle indifférence à l'égard de leur salut, au lieu de prendre cette règle de direction qui leur est si nécessaire, osent la traiter de simplicité et de foiblesse d'esprit. Demandez-leur, selon le langage de saint Pierre, quel est le pasteur de leur

[ocr errors]

pour

ame (je ne dis pas le pasteur en titre, car ils ne peuvent se dispenser d'en avoir un établi par Jésus-Christ le gouvernement de chaque église; mais le pasteur particulier qui les dirige et qui les conduit dans les voies de Dieu); ils tourneront ce discours en raillerie, et ils en feront un jeu. D'où il arrive que dans les choses du ciel et de la conscience, qui sont si importantes et si délicates, dont ils ont tant de fausses idées, et sur lesquelles ces prétendus esprits forts auroient souvent besoin d'être instruits comme des enfans, toute leur conduite se termine à n'en avoir que d'eux-mêmes, ou à n'én point avoir du tout. Ils ne craignent rien tant que cette direction, qui leur paroît importune, parce qu'elle les meneroit plus loin qu'ils ne souhaitent. Ils veulent, disent-ils, des confesseurs, et non des directeurs; comme si l'un pouvoit être séparé de l'autre, et que le confesseur, pour s'acquitter de son devoir, et pour assurer l'ouvrage de la grâce, ne fût pas obligé d'entrer dans le même détail que le directeur. Tout cela veut dire qu'ils veulent des confesseurs qui ne les connoissent pas, qui ne les examinent pas, qui ne les gênent pas; des confesseurs dont ils ne reçoivent nuls avis, dont ils n'entendent nulles remontrances, à qui ils ne rendent nul compte; parce qu'ils savent bien que s'ils se mettoient entre les mains de quelque ministre zélé, ils n'auroient pas la force de lui résister en mille rencontres et sur mille sujets, où ses décisions ne s'accorderoient pas avec leurs inclinations vicieuses et leurs passions; parce qu'ils ne sont pas bien résolus de changer de vie, ou de persévérer dans celle qu'ils ont embrassée; parce qu'ils sentent bien, et qu'ils ne peuvent ignorer quel seroit l'effet d'une direction ferme et sage, soit pour les confirmer dans ce qu'ils ont entrepris, soit pour faire de nouveaux progrès dans le service de Dieu.

Enfin, à considérer la confession par rapport à nous

mêmes, l'expérience nous l'apprend, et nous n'en pouvons disconvenir, que c'est un frein merveilleux pour arrêter notre cœur et pour réprimer ses désirs criminels. Cette seule pensée : Il faudra déclarer ce péché, a je ne sais quoi de plus convaincant et de plus fort, que les plus solides raisonnemens et que les plus pathétiques exhortations. Surtout si la confession est fréquente, et que par là elle ne soit jamais éloignée. Car la pensée d'une confession prochaine fait alors la même impression sur nous, que la pensée de la mort et du jugement de Dieu. Oui, mon cher auditeur, se dire à soimême : Je dois demain, je dois dans quelques jours comparoître au tribunal de la pénitence, et m'accuser sur tel ou tel article, c'est une réflexion presque aussi efficace et aussi touchante, que de se dire: Je dois peutêtre demain, peut-être dans quelques jours comparoître devant le tribunal de Dieu, et y être jugé. Combien cette vue a-t-elle retiré d'ames du précipice où le penchant les entraînoit, et combien y en a-t-il encore dont elle soutient tous les jours la fragilité naturelle et l'infirmité, contre les plus violentes tentations?

Mais par une règle toute contraire, quand une fois nous avons secoué le joug de la confession. que JésusChrist nous a imposé, il n'y a plus rien qui nous retienne; et livrés à nous-mêmes, en quels abîmes n'allons-nous pas nous jeter? Comme la vue de la mort ne nous effraie point lorsque nous la croyons bien éloignée, la vue d'une confession remise jusqu'à la fin d'une année, ne nous inquiète guère. On dit : Il ne m'en coûtera pas plus d'en dire beaucoup que d'en dire peu : ce péché passera bien encore avec les autres. Plus ou moins dans la même espèce, c'est à peu près la même chose. On le dit, et cependant on accumule dettes sur dettes, on ajoute offenses à offenses, on grossit ce trésor de colère qui retombera sur nous au dernier jour pour nous accabler.

De là vient que les hérésies qui se sont attaquées à la confession, ont été suivies d'une si grande corruption de mœurs : ce qui ne parut que trop dès la naissance du lutheranisme.Partout où l'usage de la confession s'abolissoit, le libertinage et la licence s'introduisoient. Cette décadence frappoit tellement les yeux, et devenoit tous les jours si sensible, que les hérétiques eux-mêmes en étoient surpris. Jusque-là (vous le savez, et qui oseroit m'en démentir), jusque-là que des villes entières, quoiqu'attachées au parti de l'erreur et infectées de son venin, s'adressèrent au prince qui les gouvernoit pour rétablir l'ancienne discipline de la confession : reconnoissant qu'il n'y avoit plus chez elles ni bonne foi, ni probité, ni innocence, depuis que les peuples étoient déchargés de ce joug qui les retenoit. De là vient que l'hérésie de Calvin fit d'abord de si grands progrès, et trouva tant de sectateurs, parce qu'en les affranchissant de la confession, elle leur donnoit une libre carrière pour se plonger impunément dans tous les excès, et pour vivre au gré de leurs cœurs corrompus. De là vient qu'à mesure que l'iniquité croît dans le monde, la pratique de la confession diminue, et que l'on commence à la quitter dès que l'on commence à se dérégler.

Vous me direz qu'il se glisse bien des abus dans la confession. Je le veux ; et de quoi dans le christianisme ne peut-on pas abuser et n'abuse-t-on pas en effet? Mais tous les abus qu'on peut faire d'un exercice chrétien, ne lui ôtent rien de son excellence et de ses avantages, puisque ce n'est pas de l'exercice même que viennent les abus, mais de nous qui le profanons. Ainsi malgré les fautes qui se commettent dans la confession, ou qui peuvent s'y commettre, trois vérités sont toujours incontestables. La première, que d'elle-même et de son fond, c'est pour le pécheur un moyen de conversion et de persévérance dans sa conversion; la seconde, que

c'est encore pour le juste un moyen de perfection et de sanctification; et la troisième, que la conséquence qui suit naturellement de là, c'est de retenir l'usage de la confession, et cependant d'en corriger les abus. Grâces immortelles vous soient rendues, Seigneur, Dieu de toute consolation et Père des miséricordes. Vous pouviez, après notre péché, nous abandonner, et par un prompt châtiment, punir notre ingratitude, et réparer ainsi votre gloire; votre justice le demandoit : mais votre bonté s'y est opposée, et vous a inspiré des sentimens plus favorables. Elle nous a ouvert une voie sûre, une voie courte et facile pour retourner à vous. C'est par que vous venez vous-même nous chercher. Heureux, si nous écoutons votre voix, si nous la suivons, si nous rentrons comme la brebis égarée, dans votre troupeau, pour entrer un jour dans votre royaume, où nous conduise, etc.

« AnteriorContinua »