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1° La pureté d'àme, qui consiste à attendre de la faveur de Dieu, sans trouble ni inquiétude, ce que l'on désire;

2o La rectitude d'intelligence, qui consiste à penser que la chose la plus nécessaire et la plus indispensable est la droiture de l'âme ;

3° La finesse, qui nous fait considérer comme de primordiale importance de préparer notre âme à une prompte ou prochaine mort;

4° La bonne intention, c'est-à-dire de chercher à pénétrer, selon ses moyens, les vérités fondamentales de chaque chose, autrement dit s'efforcer de s'instruire, tant de l'intérieur que de l'extérieur, de ce qui n'a point encore été pénétré ;

5° La facilité d'étude, qui consiste, au moyen d'une application et d'un effort constants, à expliquer ce qui n'a point été jusqu'alors compris ;

6o La mémoire, qui consiste à conserver les connaissances acquises et à se les assimiler;

7° La divulgation, qui consiste à mettre en lumière ce qu'on a gravé dans sa mémoire.

CHAPITRE V

DU COURAGE

Le courage prend naissance de onze vertus :

1° Considérer l'opulence, la pauvreté, la grandeur et la petitesse, comme choses indifférentes; c'est la hauteur de vue;

2o Rester indifférent à l'égard de ce qui arrive ou n'arrive point dans le monde; c'est l'élévation de pensée ;

3° Résister aux peines et aux tribulations; c'est la fermeté ;

4° Ne manifester ni trouble ni émotion quand l'on se trouve en des circonstances propres à inspirer la crainte et la terreur; c'est la vaillance;

5° Conserver sa liberté d'esprit en présence de la violence et de la contrainte par la force; c'est le calme;

6° Procéder dans les discussions et les contestations avec une sage lenteur; c'est la tranquillité;

7° Témoigner du respect aux inférieurs doués de vertus, de biens ou de fonctions; c'est l'humilité;

8° Mériter une mention flatteuse dans les affaires les plus difficiles, et les conduire à une heureuse réussite en y mettant tous ses soins; c'est l'habileté ;

9° Affaiblir la sensualité par le moyen d'actions bonnes et d'heureux augure; c'est la prévision;

10° Se garder et se préserver de toute faute contre l'honneur ou la religion; c'est la dignité;

11° S'attrister des malheurs ou des chagrins qui arrivent à autrui; c'est la commisération.

CHAPITRE VI

DE L'ABSTINENCE

L'abstinence nait également de onze vertus :

1° S'abstenir de commettre, soit d'entraînement, soit de propos délibéré, les fautes qualifiées de turpitudes par la loi sacrée ; c'est la pudeur;

2o Résister aux mouvements de violence qui agitent l'esprit ; c'est la patience;

3o Dans l'âge où l'on est agité des désirs de la concupiscence, se tenir, de propos délibéré, dans la réserve; c'est la retenue;

4° Se garder de toute injustice ou tromperie, en vue de s'approprier l'argent d'autrui, dût-il être dépensé dans un but louable; c'est la délicatesse;

5° Se contenter de ce qu'on a; c'est la sobriété d'esprit ;

6° Poursuivre le but qu'on se propose avec une sage lenteur; c'est la gravité;

7° Etre disposé à trouver à chaque action un but juste, intelligent ou raisonnable; c'est la bienveillance;

8° Louer les bonnes qualités d'autrui; c'est l'aménité;

9o Dans ce qu'on fait se montrer assidu à n'être qu'agréable; c'est la circonspection;

10° Savoir déterminer et indiquer en toute occurrence d'affaires et selon l'opportunité, la marche à suivre pour la mise en ordre et le succès; c'est l'organisation;

11o Selon les circonstances et les hommes, savoir donner ce qui est convenable; c'est la générosité.

CHAPITRE VII

DE LA GÉNÉROSITÉ

La générosité se compose, à son tour, de six qualités diffe

rentes :

1° Donner de bon cœur et avec facilité; c'est la libéralité;

2° Subvenir aux besoins d'autrui avant de satisfaire à la dépense de ses propres nécessités; c'est la préférence (charité);

3o Offrir comme en se jouant ce qu'on donne; c'est l'adresse ; 4° Abandonner aux amis comme aux ennemis ceux de vos biens qui les éblouissent ou les occupent; c'est la grâce;

5o Faire des largesses, même quand elles ne sont point obligatoires; c'est la munificence;

6° S'abstenir de négliger les choses nécessaires; c'est l'attention 1.

Voilà comment s'acquièrent, selon ce qui vient d'être dit, les trois principales facultés de l'âme humaine: la sagesse, le courage et l'abstinence.

De ces vertus moyennes, autrement dit des parties du milieu (les qualités extrêmes étant désignées sous les épithètes d'insuffisantes et d'excessives), nous avons détaillé les différents modes. Nous avons enfin essayé de faire comprendre par nos explications l'ensemble de ce qui les concerne. Maintenant, nous allons commencer à parler de la justice et de ses diverses nuances.

1) Elle consiste, dit le traducteur turc, à ne point négliger pendant un certain délai, ne fût-ce qu'une journée, de faire remettre à autrui ce qu'il compte avoir, de façon à ne point lui laisser perdre espoir.

CORRESPONDANCE

Nous avons reçu de M. Clermont-Ganneau la lettre suivante, que nous nous empressons de communiquer à nos lecteurs.

MONSIEUR LE DIRECTEUR,

Paris, 30 juillet 1887.

M. Carrière s'est chargé de présenter au public français, par l'intermédiaire de votre Revue, le travail qu'ont fait paraître l'année dernière MM. Smend et Socin sur la stèle de Mésa. Dans ce premier article, il admettait sans réserve, et comme des faits désormais hors de conteste, les progrès considérables que les deux savants allemand et suisse annonçaient solennellement avoir fait faire au déchiffrement du texte. Cet arrêt, basé uniquement sur le jugement rendu en leur propre faveur par les parties intéressées elles-mêmes, n'en était, pour ainsi dire, qu'une homologation signée les yeux fermés et tendant à le rendre exécutoire en France; il prouve surtout l'entière confiance que les deux professeurs de Tubingue et de Bâle ont su inspirer à M. Carrière. Peut-être, cependant, eût-il gagné à être appuyé de quelques considérants, après examen sur pièces originales, des points en litige, par le critique qui, sans autre forme de procès, l'a si facilement revêtu de son exequatur. Pour être équitable, un tel jugement doit au moins être contradictoire, et il ne suffit pas, pour condamner ainsi les gens au pied levé c'est de moi qu'il s'agit,

sur l'ouï d'une simple plaidoirie, fût-elle en allemand.

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d'opiner du bonnet

En publiant mon mémoire en réponse à «< ces Messieurs » 2, j'espérais fournir à M. Carrière les moyens et l'occasion de revenir utilement, avec un supplément

1) Sept.-octobre, 1886, p. 238.

2) Cette expression, parfaitement correcte, dont j'ai dû me servir pour plus de brièveté dans mon mémoire pour désigner couramment mes honorables contradicteurs, a le don de déplaire à M. Carrière, qui me la reproche assez aigrement. J'en suis fâché, mais je trouve qu'il est vraiment bien chatouilleux sur le chapitre de ce qui touche à ses clients. Tout le monde n'a pas, comme lui, l'avantage d'entretenir avec eux des relations autorisant l'emploi de formules plus intimes. Celle-ci m'a paru commode, ne lui en déplaise, je continuerai d'en user, le cas échéant.

d'information, sur une question qu'il s'était, à mon sens, trop empressé de présenter comme définitivement tranchée. Il le qualifie, dans le nouvel article qu'il veut bien lui consacrer, « de sévère et de pas toujours juste. » Me permettrat-il de lui retourner le compliment? Je n'ai malheureusement pas le don, paraîtil, d'inspirer autant de confiance à M. Carrière que mes deux savants contradicteurs. Entre leurs affirmations et les miennes, il n'a pas un moment d'hésitation. Son siège est fait; il confirme purement et simplement son jugement antérieur : « Dans leur ensemble, dit-il, les améliorations introduites (par ces messieurs) dans le déchiffrement du texte de l'inscription moabite ne sont pas atteintes par la rigoureuse épreuve à laquelle elles viennent d'être soumises. Pas atteintes dans leur ensemble? que faut-il entendre par là? Il ne saurait s'agir, dans une étude de cette espèce, que d'un « ensemble » de détails. Or, M. Carrière est forcé de reconnaître que «< certaines de mes observations ont une base plus solide » et que «< plusieurs sont même de nature à remettre en question des lectures fort séduisantes. » Sur nombre de points, en effet, j'ai pu donner des démonstrations d'ordre matériel qui sont sans réplique et qui établissent que MM. Smend et Socin ont fait absolument fausse route. L'on n'est donc pas fondé à dire que « l'ensemble » de leurs allégations n'est pas atteint, puisque, du demi-aveu même du critique, un bon nombre l'est, et qu'en pareil cas, un ensemble c'est un total. De plus, ces messieurs ont fourni, par ces méprises, acquises à la cause, la mesure générale de leur prétendue infaillibilité visuelle.

Sur d'autres points, où l'on ne pouvait démontrer aussi objectivement la maté rialité de l'erreur, j'ai dû me borner à opposer lecture à lecture, disant moimême qu'il y avait là une affaire d'équation personnelle sous le rapport des facultés visuelles, et que nous ne pourrions être départagés que par des tiers. Mais, ayant surabondamment prouvé, par ailleurs, que ces Messieurs étaient, tout comme d'autres, fort capables de voir et de lire mal, j'estimais qu'entre leurs affirmations et les miennes, affirmations garanties des deux parts par une même « probité scientifique », un arbitre impartial devait, jusqu'à plus ample informé, tenir la balance égale, du moment surtout qu'il ne jugeait pas au fond et qu'il n'essayait pas de se faire une opinion par lui-même. «< Rien ne prouve, dit cependant M. Carrière, que MM. Smend et Socin ne voient pas mieux que M. Clermont-Ganneau. » — Il eût été au moins courtois, sinon équitable, d'exprimer l'autre terme de l'alternative. « On le saura, ajoute M. Carrière, quand quelques dizaines d'épigraphistes se seront appliqués à l'étude de la stèle. »> En attendant, il octroie, par présomption, à mes contradicteurs, le bénéfice de l'uti possidetis, et, jusqu'à preuve du contraire, c'est moi qu'il tient en suspicion.

Et pourquoi M. Carrière, qui s'érige, au regard du public français, en juge souverain de ce débat, n'a-t-il pas donné l'exemple de cette vérification du texte? Les documents originaux sont, depuis des années, à sa disposition,

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