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et que

camp, qu'il fallut y adjouter; la charge d'admiral de France, à laquelle le duc de Mayenne l'avoit nommé, Biron fut contraint de luy lascher malgré luy : outre encor cinq ou six des meilleures et plus riches abbayes de Normandie, qu'il fallut retirer des bons serviteurs du Roy qui les tenoient, et les mecontenter; douze cent mil francs d'argent pour payer ses dettes, et soixante mil francs par an de pension, qu'il ne garda pas longtemps.

M. de Villars étoit fort hautain et emporté; il étoit des plus avant dans la Ligue, et n'y vouloit point reconnoistre d'authorité au-dessus de la sienne : de sorte que voyant la Ligue sur son declin, et se voyant obligé d'avoir un maitre, il aima autant le chercher en la personne du Roy son souverain seigneur, que d'obéir à un autre qu'il estimoit n'estre plus que luy. Et fut son accommodement traitté par M. de Rosny, tous ceux qui s'en estoient meslés avant luy n'y ayant reussy.

Le lundy 28 mars, M. le chancelier se rendit en la grande chambre du parlement, avec plusieurs ducs et pairs, et officiers de la couronne, conseillers d'Etat et maitres des requetes; et là fit lire à huis clos la commission des susdits Loisel et Pithou, nommés pour avocat et procureur generaux; et leur fit prester serment de bien et fidelement exercer icelles charges. Puis les huis ouverts, fit lire et publier l'edit de retablissement du parlement; et sur la remontrance de Loisel, il fut ordonné qu'il seroit enregistré.

Alors M. le chancelier ayant fait refermer la grande chambre, ordonna à Loisel et Pithou, qui faisoient pour les gens du Roy, de se transporter vers messieurs du parlement, qui avoient provisions du Roy et de ses

predecesseurs, et qui avoient été mandés en la chambre de Saint-Louis, où ils attendoient l'ordre de M. le chancelier; et de leur dire qu'ils vinssent à la grande chambre : ce qu'ils firent avec lesdits Loisel et Pithou, qui alloient devant eux. Et après que tous les uns ensuite des autres, et par ordre de dignitez et receptions, eurent presté nouveaux sermens és mains de M. le chancelier, leur fut permis d'exercer leurs charges comme auparavant. Quant à ceux qui avoient provisions du duc de Mayenne, ils n'y furent admis, jusqu'à ce qu'ils eussent obtenu nouvelles lettres du Roy. Après quoy fut registré l'edit et declaration du Roy sur la reduction de la ville de Paris.

Autant en fut fait pour le retablissement de la chambre des comptes et les generaux des aydes, où M. le chancelier se transporta, et fit comme au parlement. Et quant à la cour des monnoyes, il n'y fut point, n'estimant pas cette fonction digne de sa charge; mais y envoya deux conseillers de Sa Majesté, Claude Faucon de Ris, et Geoffroy Camus de Pontcarré.

La declaration pour le retablissement du parlement et autres cours de Paris porte que le Roy retablit en leur premier état, dignité et authorité, ceux de ses conseillers qui y étoient restés pendant les troubles : comme si deja toute la compagnie y étoit rassemblée, à la charge de faire nouveau serment de fidelité entre les mains du chancelier, et qu'ils recevront de sa bouche les monitions et commandemens que le Roy en son conseil avoit jugé devoir leur être faits.

Celle pour la reduction de Paris porte asseurance expresse pour la conservation de la religion catholique, apostolique et romaine; confirmation des privileges

de ses habitans tant en general qu'en particulier, et abolition entiere des choses avenues à l'occasion des troubles sous reserve neantmoins des voleries, assassinat du feu Roy, conspirations contre la vie de Sa Majesté à present regnante, et de tous crimes et delits commis et punissables entre gens de même party.

Les cours receurent aussy, chacune en droit soy, les nouveaux sermens des officiers et membres de leur dependance. En quoy chacun s'empressa, pour effacer et éloigner tout soupçon d'étre ligueurs, qui n'étoient plus à Paris qu'en petit nombre, même avant que le Roy y fût entré.

Le même jour, les officiers du chastelet, qui s'étoient retirés à Saint Denis, où ils tenoient leurs sceances, les vinrent reprendre à Paris, maistre Antoine Seguier étant lieutenant civil; et, suivant les ordres du Roy, il fit prester nouveaux sermens en ses mains, et aux autres conseillers et officiers qui étoient restés à Paris, et avoient suivy la Ligue.

Le mercredy 30 mars, fut lû et verifié en la cour de parlement un edit pour la creation d'un office de septieme president de la cour en faveur de Jean Le Maistre, qui auparavant étoit president pour la Ligue de la façon du duc de Mayenne, et étoit le premier des quatre par luy créés, et avoit presidé au parlement depuis la mort de Brisson; d'un office de president en la cour des comptes pour et en faveur de Jean L'Huillier, maistre des comptes et prevost des marchands; et des deux offices de maistres des requetes, l'un pour Martin Langlois, avocat et echevin de Paris, l'autre pour Guillaume Du Vair, conseiller au parlement : tous lesquels avoient bien merité telles recompenses,

et avoient des plus contribué à reduire Paris, notament Langlois, qui avoit sa partie à part, et y auroit reussy, étant homme d'entendement, hardy et resolu. Il avoit pratiqué le capitaine Saint-Quentin, colonel d'un regiment de Wallons; et sur l'avis qu'il en fit donner au Roy, luy fut enjoint de s'unir et concerter avec le comte de Brissac, gouverneur, le president Le Maistre, le prevost des marchands L'Huillier, et autres bons serviteurs du Roy qui agissoient aux mêmes fins. Et dit-on qu'aucuns d'eux n'avoit pacte ny marché avec le Roy, qui fit pour eux de sa bonne et franche volonté ce qu'ils ne luy avoient point demandé : dont ils sont très-louables. Aussy quand L'Huillier presenta au Roy les clefs de la ville le jour qu'il y entra, le comte de Brissac luy ayant dit : « Il faut rendre à Cæsar ce qui << appartient à Cæsar, » il luy repondit fierement : « Il « faut le luy rendre, et non pas luy vendre. >> Ce qui fut bien entendu par le Roy, qui n'en fit semblant.

Le même jour, la cour rendit et fit publier l'arrest qui ensuit, par lequel elle revoque et annulle le pouvoir de lieutenant general de l'Etat et couronne de France donné au duc de Mayenne par ceux de la Ligue, ou qu'il avoit usurpé luy-même.

Extrait des registres du parlement.

« La cour ayant, dès le douzieme jour du mois de janvier dernier, interpellé le duc de Mayenne de reconnoitre le Roy que Dieu et les loix ont donné au royaume, et procurer la paix, sans qu'il y ait voulu entendre, empeché par les artifices des Espagnols et leurs adherans; et Dieu ayant depuis par sa bonté infinie delivré cette ville de Paris des mains des étrangers, et

reduite en l'obeissance de son roy naturel et legitime : après avoir solemnellement rendu graces à Dieu de cet heureux succès, voulant employer l'authorité de la justice souveraine du royaume pour, en conservant la religion catholique, apostolique, romaine, empecher que sous le faux pretexte d'icelle les étrangers ne s'emparent de l'Etat, et rappeller tous princes, prelats, seigneurs et gentilshommes, et autres sujets, à la grace et clemence du Roy, et à une generale reconciliation, et reparer ce que la licence des guerres civiles a alteré de l'authorité des loix et fondement de l'Etat, droits et honneurs de la couronne; la matiere mise en deliberation en ladite cour, toutes les chambres assemblées, a declaré et declare tous arrests, decrets, ordonnances et sermens donnés, faits et prestés, depuis le 29 decembre 1588, au prejudice de l'authorité de nos roys et loix du royaume, nuls, et extorqués par force et violence; et comme tels les a revoquez, cassez et annullez, et ordonne qu'ils demeureront abolis et supprimés; et par especial a declaré et declare tout ce qui a été fait contre l'honneur du feu roy Henry III, tant de son vivant que depuis son deceds, nul; fait deffences à toutes personnes de parler de sa memoire autrement qu'avec tout honneur et respect; et en outre ordonne qu'il sera informé du detestable parricide commis en sa personne, et procedé extraordinairement contre ceux qui s'en trouveront coupables. A ladite cour revoqué et revoque le pouvoir cy-devant donné au duc de Mayenne, sous la qualité de lieutenant general de l'Etat et couronne de France; fait deffences à toutes personnes, de quelque etat et condition qu'ils soient, de le reconnoistre en cette qualité, lui prester aucune obeis

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